Tout a commencé sur un bout de trottoir, face à un panneau Decaux. Car c’est l’affiche de l’exposition « Photographier l’Algérie » qui m’a tout d’abord interpellée. Que pouvait donc bien vivre cette jeune femme en liesse, laissant éclater sa joie depuis la fenêtre d’une voiture ? Renseignement pris, il s’agit d’un cliché de Marc Riboud, photoreporter pour l’agence Magnum, qui a su rendre compte de la puissance populaire de l’indépendance algérienne en 1962. Je ne peux que vous encourager à visiter l’exposition « Photographier l’Algérie » à l’Institut du Monde arabe de Tourcoing. Marc du du blog culturel Slow Culture et moi même avons été totalement séduits. Ne tardez pas, l’expo est présentée jusqu’au 13 juillet.
RAISON 1 : de salle en salle, nous nous sommes laissés emporter par la centaine de photographies retraçant l’histoire algérienne du XXe siècle, de la conquête coloniale au pays désormais résolument moderne et tourné vers l’avenir. Après une entrée en matière composée de cartes postales et de revues illustrées colonialistes, vous découvrirez des instantanés anonymes datant des années 1910, à l’heure où les équipements photographiques commençaient à apparaître dans les familles de colons.
Nous nous sommes longuement attardés devant les clichés de Jules Gervais-Courtellemont qui rendent compte avec une tendresse infinie de son intérêt sincère pour le pays et ses habitants. Ces derniers sont incroyablement mis en valeur dans des scènes quotidiennes. Un vrai coup de coeur.
Autre moment marquant, les photographies du sociologue Pierre Bourdieu réalisées lors de ses recherches entre 1957 et 1961, montrant un pays en pleine guerre de libération. Cette série de formats carrés en noir et blanc prise à hauteur d’homme permet de rentrer dans une intimité et une proximité indéniables. Inoubliable.
RAISON 2 : des regards remplis d’audace. Des visages teintés de défiance. Des postures empreintes de dignité. Les portraits de femmes algériennes commandés à Marc Garanger semblent nous apostropher et impressionnent par la profondeur de leurs expressions. Alors jeune appelé en Algérie, le photographe a en effet été missionné au début des années 1960 pour réaliser des portraits forcés de 2 000 femmes dévoilées afin de leur attribuer des cartes d’identité. Un témoignage que vous n’oublierez pas… Nous non plus.
RAISON 3 : le saviez-vous ? L’IMA-Tourcoing est implanté dans une ancienne école de natation, rue Gabriel Péri. Autant vous dire que la visite vaut également son pesant de cacahuètes pour l’architecture des lieux. Détail insolite qui nous a plu : les deux orifices insérés dans une photo grand format de l’ancien bassin, dans une salle de l’exposition temporaire. On y découvre le bassin en question qui sera prochainement lui aussi réhabilité en lieu d’exposition dans le cadre du projet d’agrandissement de l’IMA-Tourcoing. On a hâte !